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“La crise sanitaire a donné un coup de booster au dialogue social” Interview Amélie d’Heily pour ActuEL-RH.

source : ActuEl-rh

Amélie d’Heilly présidente de l’association AvoSial.

Quelles sont vos projets pour l’association ?

Nous souhaitons continuer sur la très belle lancée de l’association et la faire grandir en régions. Il existe déjà des groupes locaux que nous voudrions continuer à développer et nous souhaiterions nous implanter dans de nouvelles régions. D’autant que les changements de pratiques induits par la pandémie ont favorisé le développement des réunions à distance et nous permettent d’être plus réactifs sur les sujets dont nous sommes saisis par nos adhérents. 

Quelles évolutions du droit du travail allez-vous porter dans le cadre de la présidentielle ?

Nous allons présenter 12 propositions pour la présidentielle. Nous allons commencer à rencontrer les équipes de campagne des principaux candidats à l’élection présidentielle dans les semaines qui viennent. Nous sommes satisfaits car parmi celles que nous avions proposées en 2017, un certain nombre ont été mises en œuvre, telles que la sécurisation des licenciements ou bien encore le développement du dialogue social. Pour cette présidentielle, nos propositions s’articulent autour de cinq thèmes.

Avant tout, nous proposons la création d’un code des travailleurs plus compréhensif et plus englobant. Il existe déjà divers statuts dans le code du travail qui ne sont pas forcément des salariés. On constate en outre une évolution vers un socle commun conduisant probablement, à long terme, à un statut unique et universel.  

Les propositions suivantes concernent les libertés fondamentales en matière de contentieux. Nous souhaiterions que soient clarifiées plusieurs situations, par exemple, en cas de licenciement nul, l’indemnité doit tenir compte des revenus de remplacement. Plus largement, nous souhaitons que soit instauré un principe d’égalité et de liberté dans les moyens de preuve autant pour le salarié que pour l’employeur. 

Troisième axe, le télétravail. Nous estimons nécessaire que l’employeur donne son accord en cas de télétravail à l’étranger, ce qui n’est actuellement pas prévu dans la loi car il existe un principe de liberté de choix du domicile du salarié. Nous préconisons également une inversion de la charge de la preuve en cas d’accident du travail dans le cadre du télétravail.

Quatrièmement, nous souhaitons une évolution des règles d’inaptitude et une réforme du contentieux lié aux avis du médecin du travail. Celle de 2016 n’a pas fonctionné ; on manque de médecins-experts, ce qui entraîne des délais très longs en cas de contestation et donc un coût non négligeable pour l’employeur qui doit reprendre le versement du salaire. Dernier point à clarifier : l’impact de la suspension du contrat de travail sur la prescription des faits fautifs. 

Enfin, nos dernières propositions portent sur la mobilité des salariés. Il nous semble nécessaire de clarifier le prêt de main d’œuvre à but non lucratif dans le cadre de l’intra-groupe notamment. En matière de transfert des contrats de travail, la question de la divisibilité du contrat de travail en cas de transfert d’entreprise représente un véritable casse-tête pour les entreprises avec des risques importants. Nous proposons également que le délai de prescription de l’action contentieuse en cas de transfert soit raccourci de 12 mois à trois mois.

Comment envisagez-vous la présidence française de l’Union européenne ?

La France prend la présidence de l’Union européenne mais l’agenda a été arrêté depuis longtemps. La France pourrait toutefois appuyer certains sujets. La net-économie va justement être l’un d’entre eux lors de présidence française. Or, la France est tiraillée entre la nécessité de rester très attractif pour cette net-économie qui génère des emplois pour des personnes qui n’en avaient pas et notre modèle social auquel nous sommes attachés.

Quels enseignements tirez-vous de la crise sanitaire ?

Le développement du télétravail est une bonne chose à condition de ne pas passer au “tout télétravail”. En effet, pour les RH se posent des questions d’acclimatation à la politique de l’entreprise, de maintien du lien social, d’appartenance à l’entreprise. C’est aussi la question de l’évaluation et du contrôle du travail qui se pose et celle du management à distance. 

La crise sanitaire a donné un coup de booster au dialogue social : accords sur le télétravail, sur le versement de primes, sur le temps de travail. On a pu observer une inflation d’accords car les partenaires sociaux ont été obligés de se saisir des nouveaux modes de dialogue social et des thèmes imposés par la crise sanitaire. Le développement des relations à distance avec les représentants du personnel a bien fonctionné et a permis d’être réactifs.

Certains syndicats, comme la CFDT, demandent certaines évolutions des ordonnances Travail. Quel bilan en tirez-vous de votre côté ?

Les ordonnances Macron ont opéré une vraie libération du dialogue social et un passage au CSE par le dialogue social. Certes, les représentants de proximité n’ont pas rencontré un réel succès mais certaines entreprises y reviennent. La disparition du CHSCT a été problématique pour certaines entreprises. Le vrai problème de fond c’est la formation des élus. Ils deviennent des élus multitâches, or on ne devient pas technicien du jour au lendemain. Il faut laisser un peu de temps au temps sur ces sujets en axant sur ces formations. 

Quant à la sécurisation de la lettre de licenciement, les pratiques n’ont pas évolué tant les modèles de lettre se sont avérés peu sécurisants pour les chefs d’entreprises qui ne seraient pas accompagnés par un avocat. 

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